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Approximativement
24 janvier 2005

PARANOGORA

Hue un petit essai, ca s'appelle paranogora

Dix-sept heures...
Bon. Faut que je me motive, c'est bien le moment de l'expédition vers le bureau de tabac, le dernier mégot écrasé dans le cendrier appelle désespérment ses prochains petits amis... faut bouger. Ouais...faut bouger... enfin... faudrait bouger, ce serait bien... ce serait VRAIMENT bien... J'ai aussi la vaisselle à faire tiens au fait... Bah! Je la ferai aprés, au retour...enfin plus tard...sûrement beaucoup plus tard, ça peut sûrement attendre demain d'ailleurs, ou... aprés demain... ça n'est pas si important au final, les moisissures n'ont pas encore commençé à joliement décorer les rebords des assiettes... Dommage, ça met trop de temps... C''est joli une moisissure, cet aspect duveteux, ces coloris bleutés... une jolie pelisse de leopard mort qui aurait séjourné un peu trop dans l'eau...
N'empêche... faut que je bouge la... ça deviendrai presque urgent, les petites motivations de la vie quotidienne, c'est que ça vous conditionne son homme n'est-ce-pas? Bref. Ca y'est. Je suis ENFIN motivé... c'est bien, que de courage, il m'a juste fallut a peu prés une heure cette fois çi pour me décider, y'a du progrés... Hop! Je me leve, je sens deja que ça risque de pas être simple cet histoire... mon salon m'apparaît curieusement tout de suite plus sombre, plus étroit, « t'es peut-être pas finalement si accro, ça peut attendre demain » ouais... mais non. Courage.
Je me leve ENFIN du canapé, ramasse mes clefs de voiture sur le bord de l'étagère, les fourre dans la poche, et les ressort aussitôt...ouais...lesgarder en main c'est ce qu'il faut, ça évacue la pression on pourrait dire...Bah... quelle pression? « tu vas juste au bureau de tabac! » ouais...ben...tant pis dans la main gauche...
La porte soigneusement fermée à clef, je descend gentiement les marches de l'escalier ...une... deux...trois...quatre...cinq...six...sept... un étage en moins. Toujours le même nombre de marches, ce qui est de toute manière parfaitement logique...Le lino de l'escalier colle légèrement aux semelles, c'est définitivement toujours aussi crade ici...Je décide de faire abstraction du drôle de truc que j'aperçois depuis toujour derrière ce foutu tuyaux contre le mur, ça ressemble à une toile d'araignée avec une forme indistincte à l'intérieur... j'ai jamais osé pousser plus loin la curiosité, ça me fait flipper ce truc, mais ça ne bouge pas...ça n'a jamais bougé, c'est peut-être juste un papier, juste une feuille ou juste un gros insecte mort...peu importe...aucune envie de le savoir...
Un...deux...trois...quatre...cinq...six...sept...huit...un deuxième étage d'avalé, le voisin a encore posé ses foutues pompes a l'extérieur de chez lui...je trouve ça triste, il a peut-être une abominable mycose, une odeur de sa plante des pieds qui pourrirait jusqu'à ses chaussures...peut-être... J'ai toujours rêvé de lui poser la question, c'est pas humain de traiter les grolles qui vous subissent à longueur de journée de cette manière, mais, en même temps, je le connais pas ce type et visiblement, personne d'ailleurs ne se connaît dans ce petit immeuble minable, on est tous de foutus lapins dans des clapiers individuels, on broute, on baise, éventuellement on va bosser tout le monde s'ignore et c'est parfait comme ça...
Un...deux...trois...quatre...cinq...six...sept...huit... et voilà...
LE palier: en face, une porte de bois, derrière: la rue. Facile. Ben non, pas tant que ça...je tourne et retourne nerveusement les clefs dans ma main... « bon ben tu va l'ouvrir cette porte? » Facile à dire... J'entends un bruit de moteur derrière, le feu tricolore est tout à coté... donc celui çi doit être au rouge, attendons quelques secondes....Ho... tiens, ben voilà un voisin qui rentre, j'ai pas l'air d'un con à me retrouver les bras ballant au milieu du couloir « salut-salut » j'aime le contact avec mes semblables...
Allez, j'ouvre la porte... qu'elle est moche cette rue décidemment, les trottoirs sont sales et défonçés, ça pue le carburant et la morosité, c'est une rue de ville quoi... En face, une jeune femme dans une voiture me dévisage lentement -dommage- j'ai pas attendu assez longtemps pour le feu passe au rouge. Je sers très fort mes clefs pour me donner une contenance, ça marche du tonnerre...en fait, pas tant que ça. N'empêche, la conductrice est charmante, je m'imagine déjà la dragouiller dans un cadre agréable et convivial (un pub a pochtron?) à ma manière, toujours imparable... tout rouge, baffouillant, ridicule,transpirant...je souris, l'autodérision, ç'est quand même bien salvateur...
Bon. La voiture est située à trente mètres dans la rue à ma gauche, je vois une longue file de véhicules qui attendent, bloqués au feu, je n'arrive pas a me décider a y aller directement, me confronter au regard de tout ces conducteurs me paralyse, va falloir ruser... Et je ruse, je finis par faire le tour du pâté de maison, j'arriverai ainsi par l'arrière, fier de moi et de ma présence d'esprit.Bravo. « t'es vraiment trop fort » C'est donc un petit détour, que je parcours le plus rapidememnt possible, la tête rentrée dans les épaules, rasant les murs, en passant devant une laverie, je choppe en flagrant délit un type entrain de matter le cul d'une nana ramassant son linge...héhé...profite mon gars, ça te coute rien et ça mange pas de pain va....
Voilà. Enfin ma voiture, je me précipite dedans, soulagé... Je suis en sueur, le dos glaçé ça n'a l'air de rien de faire deux-cent mètres à pied, mais moi, j'ai du mal, j'aime pas ça, même je deteste ça. Non. Pire. Je le supporte pas, pas la peine de se leurrer, mais j'y peux rien faut vivre avec comme on dit, mais en même temps, « on » passe son temps a dire en général pas mal de conneries...
Démarage,musique... direction le bar/tabac/PMU...situé à 400 mètres...foutue expédition, mon petit trip personnel ridicule, ma lente descente aux enfers façon « Midnight express » ou peut-être un road movie à la Wenders... pourquoi pas... qu'importe la distance, seule compte l'intensité, en l'occurence celle çi est terriblement présente et oppressante, me trouvant à mon tour bloqué à un feu, je lutte tant bien que mal contre le sentiment de panique que je sens poindre...ne pas regarder autour de soi... «faire le fier », faire abstraction, personne ne te regarde, personne ne te juge, tu n'existes même pas en fait, juste une ombre anonyme parmi les autres, chair envelopée de métal parmi ses semblables, mais je vais visiblement à l'abattoir...
J'arrive à me garer pas trop loin, juste une rue à traverser avant d'atteindre le commerce tant désiré.
Mince. Feu rouge, mains dans les poches et tripotage de clefs, je songe a bricoler une sorte de porte-cléfs avec des boules d'anti-stress asiatique, ça me botterait bien ça, juste ça fait louche dans le pantalon... et me voilà reparti à sourire bêtement...Feu vert, je traverse. Tiens, je vais innover, aujourd'hui je décide de ne marcher que sur les bandes blanches du passage piéton, et non l'inverse, on évite la routine comme on peut. Surtout, ne pas regarder la rangée d'automobilistes à ma droite...
non...on les regarde pas..non...NON! .ben trop târd... comme d'habitude, le regard aimanté de l'oeil vide, nouvelle giclée de sueur, j'aurai plus qu'a aller me doucher au retour, mais ça, c'est une constante...
Avant de pénétrer dans le bureau de tabac, il me faut à nouveau recompter ma monnaie, je sais bien que le compte est juste, mais on ne sait jamais... une piéce bêtement coinçée dans la poche, une erreur de calcul, il faut tout prévoir, eviter à tout prix la surprise qui amènerait inévitablement la panique. Mais non. Tout va bien. Je ressors rapidemment, traverse à toute vitesse, et me réfugie à nouveau avec soulagement dans ma clio adorée. Musique.Démarrage. Il est 17 heure trente, vingt-cinq minutes pour parcourir quatre-cent mètres en prenant sa voiture, je débloque peut-être en fait... Un léger rayon de soleil se décide a percer timidement d'entre les nuages, je me retrouve nimbé d'une lumière douce et rasante à travers mon pare brise et BBF3 me vrille les oreilles, l'atmosphère se réchauffe et je ne vois désormais plus grand chose, juste les vagues silhouettes des passants auréolées de lumière, j'adore cet instant, je trouve ça magique, féérique, comme si le temps etait suspendu, comme si plus rien n'existait autour de moi, c'est ma récompense face au défi de la journée, belle performance.Bravo.Tu progresses.
Le retour s'effectue bien plus rapidemment, j'en ai ma claque, il est grand temps de me réfugier dans ma grotte, me laver de toute cette angoisse qui s'évacue par tout les pores de ma peau, faudra surêment qu'un jour je songe à me faire soigner...Bah! Je le ferai plus tard .enfin plus tard...sûrement beaucoup plus tard, ça peut sûrement attendre demain d'ailleurs, ou... aprés demain... ça n'est pas si important au final...
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